Exploitation des mollusques dans les sites pré-Néolithiques et Néolithiques corses et chypriotes
Dans les communautés pré-Néolithiques puis Néolithiques méditerranéennes, les mollusques ont souvent joué un rôle secondaire mais demeurent de bons indicateurs de pratiques et comportements socio-économiques et d’identités culturelles.
Monte Leone (Corse, Mésolithique)
La fouille de ce site mésolithique par Jean-Denis Vigne en 1995 1, a révélé un assemblage de mollusques et de crustacés marins qui témoigne d’un usage essentiellement alimentaire . La collecte, locale et assez opportuniste, est ciblée sur des taxons communs et accessibles comme les monodontes, les patelles, les moules et les huîtres. S’y ajoutent des coquilles ramassées mortes de l’espèce Conus mediterraneus utilisées pour la production d’éléments de parure très standardisés qui devaient être utilisés en suspension, enfilés sur des liens. Les modalités techniques de production de ces parures, leur rôle dans l’occupation du site et leur signification techno-culturelle ne sont pas encore précisés.
Abri de La Figue (Corse-du-Sud, Néolithique moyen)
L’assemblage d’invertébrés de ce site Néolithique moyen fouillé par Pascal Tramoni 2, indique une collecte alimentaire, locale et peu investie. Elle est centrée sur le littoral rocheux et sur les espèces les plus rentables telles les patelles et les monodontes. D’autres ressources localisées en bordure d’eau, comme des crustacés et des oursins, étaient aussi parfois utilisées. Bien que les invertébrés participent peu à l’apport alimentaire carné sur ce site (moins de 1%), leur collecte et leur consommation semblent avoir été constantes durant l’occupation au point peut-être même d’avoir entraîné un appauvrissement des populations des espèces de patelles ciblées 3.
Shillourokambos (Chypre, Néolithique pré-céramique)
Ce site, fouillé sous la direction de Jean Guilaine 4 et daté entre la fin du 9e et du 8e millénaire cal. B.C., a révélé un petit assemblage de mollusques. Il témoigne d’une collecte à des fins alimentaires assez restreinte, de l’apport accidentel (avec de la terre à bâtir) de quelques escargots terrestres mais surtout de l’utilisation de coquilles fraîches ou mortes (voire fossiles) pour leur matière première. Ces coquilles ont le plus souvent été utilisées telles qu’elles, souvent naturellement percées, mais certaines ont aussi été modifiées par des techniques simples comme la percussion et, parfois, le sciage et l’abrasion.
Les caractéristiques de ces éléments s’apparentent à celles des assemblages connus pour le PPNB du Levant Sud (Palestine) et Nord (vallée de l’Euphrate) avec la rareté des dentales, la fréquence des Glycymeris et Cardium et des techniques de modification similaires 5 6. Ces caractères viennent s’ajouter aux similarités observées dans l’assemblage faunique de vertébrés 7 et dans les vestiges matériels pour argumenter le lien culturel existant entre le Précéramique ancien de Chypre et ses équivalents contemporains du continent (PPN du Proche-Orient, du Levant Sud et de l’Euphrate moyen) 8.